Comme à l’habitude, quel que soit son résultat, chacun y trouve son compte et matière à satisfaction, même si le sourire est un peu crispé. Un peu plus de 53 % d’abstentions, il est difficile de ne pas en parler. Manque de civisme, méconnaissance du rôle des régions et des hommes en place, absence de débat du fait des autres (les adversaires politiques), toutes les mauvaises bonnes raisons sont évoquées pour le déplorer. Mais le mot d’ordre est : mobilisation pour le deuxième tour, pour gagner !
Score du Parti Socialiste : 29,4 % des votants.
• Martine Aubry déclare : "Le PS est à un de ses plus hauts niveaux historiques. Les Français aujourd’hui ont exprimé leur refus d’une France divisée, angoissée et affaiblie et voulu exprimer leur souhait d’une France plus juste et forte". Elle constate le refus d'une France divisée de la part des Français, mais elle qui se pose en candidate potentielle à la prochaine élection présidentielle (pour devenir présidente de tous les Français) déclare à propos du résultat de Georges Frêche qu'elle vient d'exclure du parti socialiste : "il faut faire barrage à la Droite en Languedoc-Roussillon", ce qui revient à le soutenir alors qu'il n'était pas convenable, et par conséquent à dire que les citoyens qui votent à droite en Languedoc-Roussillon le sont encore moins !
• Benoît Hamon, porte-parole du PS, questionné à propos du dialogue engagé avec les verts pour faire alliance pour le second tour : "avant le premier tour il y avait des divergences de fond très importantes et il y aura des accords partout, n'est-ce pas artificiel, n'est-ce pas ce genre d'attitude qui décourage les électeurs ? Il répond bien évidemment que non, que cela n'était que débat, plutôt sain.
Score de l'UMP : 26,1 % des votants.
• Le premier ministre François Fillon prend la parole :"la faible participation ne permet pas de tirer un enseignement national de ce scrutin. Rien n'est donc joué pour le second tour dans de nombreuses régions. Les électeurs ne sont la propriété d'aucun parti.
• Xavier Bertrand déclare que rien n'est joué et refuse d'évoquer une défaite : "ça va se jouer dans un mouchoir de poche". Daniel Cohn-Bendit visiblement énervé lui rétorque : "je trouve ça con. Pourquoi vous ne voulez pas dire que vous avez perdu ?" Bel exemple de débat, mais pour une fois ce n'est pas de la langue de bois !
Score d'Europe-Écologie : 12,1 % des votants.
• Ce même Daniel Cohn-Bendit jubile : "l'écologie est aujourd'hui en France la troisième force politique".
Score du FN : 11,51 % des votants.
Score des autres partis : 20,9 % des votants.
• Parmi ceux-ci, Jean-Luc Mélenchon (Front de gauche) me semble le seul lucide, ou tout au moins le seul à reconnaître la vérité lorsqu'il déclare : "l'abstention n'est pas une case creuse, c'est une forme d'insurrection civique de gens qui disent qu'ils en ont ras le bol, et ça s'adresse à tout le monde"
En effet, on a beau dire que l'abstention n'est pas prise en compte, que cette posture est déplorable, il s'agit tout de même d'un fait particulièrement important. C'est une façon de montrer son insatisfaction devant l'impossibilité de l'exprimer autrement. Je ne pense pas que les hommes politiques ne le comprennent pas, je crois plutôt qu'ils feignent de l'ignorer, parce que ça les arrange et qu'ils sont contraints de le faire pour continuer à jouer le jeu du système dans lequel ils s'agitent.
C'est pourtant un jeu dangereux, "le ras-le-bol" est présent tous les jours, et s'exprime de plus en plus souvent dans la rue, même par des catégories sociales qui n'avaient pas l'habitude de le faire. Il s'exprime aussi dans les entreprises, par le malaise de plus en plus révélé des salariés, par les séquestrations de dirigeants, par la destruction d'outils de travail. Attention à l'escalade, aux surenchères, surtout lorsque nos élites dirigeantes les attisent par leurs dénigrements mutuels systématiques et la conduite indécente de certains.
"Le PS est à un de ses plus hauts niveaux historiques" s'est gargarisée Martine Aubry ! C'est faux ! Peut-être en pourcentage, en pourcentage de quoi ? En pourcentage de même pas la moitié des électeurs. Moins il y aura de votants, plus les pourcentages seront importants. Le tableau ci-dessous montre une réalité beaucoup moins glorieuse.
Par rapport aux : .....Votants en % .........Total des électeurs en %
Total ...........................100,0.............. .........100,0
PS .................................29,4 ............................13,8
UMP ............................26,1 ............................12,2
EE ...............................12,1 .............................5,7
FN ................................11,5 .............................5,4
Reste ............................20,9 .............................9,8
La participation sera-t-elle meilleure au second tour ? Je crains que non. Il y aura parmi ceux qui ne seront pas présents au second tour des électeurs du premier tour qui, déçus, ne participeront pas. Il y en aura d'autres qui, s'étant abstenus au premier tour pour montrer leur désappointement, se manifesteront au second plutôt pour voter "contre" celui que l'on ne veut pas voir quel qu'en soit le motif. Vote que s'appropriera bien à tort celui qui en bénéficie, pour déclarer qu'il a réussi à mobiliser ses électeurs pendant l'entre-deux tours.
J'ai déjà parlé de ces problèmes d'abstentions en d'autres occasions (voir ci-dessous "Elections Européennes).
Je pense que le système politique dans son mode de fonctionnement actuel ne peut pas apporter les réponses attendues par les électeurs de quelque bord qu'ils soit.
• Les citoyens attendent un vrai changement de Société, il n'y a pas de véritable projet pour cela, porté par les différentes sensibilités politiques, d'aucune tendance.
• Les acteurs politiques sont paralysés par la peur de perdre les élections, ils ne cessent de le répéter, ce qu'ils veulent c'est "gagner", et non répondre aux attentes des citoyens.
• N'ayant pas de vrais projets pour se différencier les uns des autres, il n'y a pas de débats dignes de ce nom, seulement des attaques lamentables, contre les personnes, contre les projets présentés par ceux qui sont en place (quel que soit leur bord). Face à ce dénigrement systématique de nos élites par nos élites, chaque réforme présentée suscite la peur de se faire avoir est de plus en plus l'envie de "descendre dans la rue" pour dire non !
• Ils sont "contrôlés" par des minorités puissantes : puissances financières, lobbys, associations militant pour de nobles causes (pas toujours), qui leur imposent chacune à leur façon leurs propres attentes sectorielles, et qui en définitive ne sont pas celles de la grande majorité des citoyens.
• Les mesurettes, les compromis, les amendements, construisent des usines à gaz qui ne fonctionnent pas, tant elles sont complexes et sans ressources financières. Ce n'est pas en prenant une mesure de plus en rendant le vote obligatoire que l'on pourra répondre à ce problème.
Je pense que les citoyens sont demandeurs de réformes, de projets, correspondant à leurs attentes. Ils s'opposent à ce qu'on leur présente pour les raisons évoquées ci-dessus et non pas parce qu'ils n'en veulent pas.
J'ai développé dans mon livre Utopies ? des idées qui pourraient permettre de faire bouger les choses, je le pense. En gros, puisque le système politique actuel (je dis bien le système, pas forcément les hommes) ne le permet pas, il faut changer le système. C'est une chance, les outils modernes de communication pourraient le permettre aujourd'hui. Nous pourrions faire évoluer nos démocraties représentatives vers des démocraties plus directes, dans lesquels ce seraient les citoyens qui feraient les choix parmi des projets qui leur seraient proposés. Je dis bien les choix, pas la construction des projets qui est du ressort de spécialistes, d'experts, proposant différentes alternatives. Quelle révolution ! Ce serait une manière a vraiment responsabiliser les citoyens, à les re-intéresser à la politique. Ce serait également la diminution très sensible du système des privilèges, des pressions inacceptables d'intérêts particuliers. Évidemment, cela peut paraître utopique. Utopique peut-être quant à la volonté de faire, mais en tout cas pas quant à la faisabilité. La volonté de le faire c'est aux citoyens de l'avoir !
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